jeudi 8 mai 2008

L’épuisette



Aux premières lueurs adolescentes

Assis sur un rondin de chêne

J’attendais en ruminant d’impatience


Canne à pêche en main

J’observais ma ligne de vie

A son extrémité s’y trouve un plomb

Trempé d’acier et de regrets


Un fil si long, qu’un pêcheur d’expériences

L’aurai jugé lourd, sans but, ni fin

Je fixe le ciel pour l’écho d’une réponse

Rien au bout de ma ligne

Rien qu’une canne serrée

Qui me fait avancer

Encore, toujours plus loin

Loin de nos illusions


A croire qu’il faut aimer

A observer tous ces cercles sur l’eau

A imaginer saisir le poisson

Qui viendrait se nourrir

Sur l’appât de ma vie

En pêchant au hasard

On ouvre la rencontre


Le bouchon peut couler

Jusqu’à en être flou

Il revient en surface

C’était un faux ami...

Un poisson de passage

Qui voulait partager

Et faire son effet


Des poissons argentés

J’en ai souvent croisé

Ils ont construit ce que je suis

M’ont offert l’amitié

D’une éphémère saison

Je devais être assis

Sur un bois trop humide


Je change d’ustensile

Pour donner du volume à la fidélité

Avec force, aujourd’hui

Je sors mon épuisette

Elle permet de filtrer

La nourriture céleste

Qu’on appelle “Amitié”



Quelques gardons, encore ici, frétillent

Trop minces, ils ne peuvent sans pêcher

De former un petit banc vert

De nouveaux rivages


Moi...je reste là...

A essuyer mes larmes

Jamais d’amertumes pour ceux

Qui se sont évanouis

Je me souviens des les avoir aimé

J’ai traversé leur vie

Ils ont percé mon coeur


Cela reste logique quand on est un pêcheur

Alors, je choisis l’herbe fraîche

Je vais me reposer

Enfin avec l’amour

Plus fort que l’amitié

Qui maintenant m’entoure


Je n’avais pas compris

Qu’être pêcheur reste un art

De cultiver l’envie

Sans vouloir posséder


Je dois plier ma canne

Car, je suis épuisé

D’avoir tant réfléchi

Sur le reflet d’un lac

Où Narcisse se pencha


Il reste dans ma poche

Mes fidèles poissons

Qui ne profitent de rien

Et ne réclament rien

Des poissons pilotes

Qui véhiculent l’esprit


L’épuisette nous laisse l’unique qualité

Elle ne s’encombre plus d’être trop bien remplie

Elle n’avait pas saisi le plus beau des trophés

Elle n’écoutait pas assez

Elle croyait, elle savait ...

Elle aussi, je devrais la plier


Je dois vous dire merci

Avant de vous aimer

Deux biens meilleurs appâts

Notre sincérité

Notre fidélité


Aucun commentaire: